Une bouteille à la mer

Pour une fois... c'est moi qui écrit.


Je vais avoir 44 ans cette année, cela fait donc plus de 20 ans que je grenouille activement dans la formation, l’orientation, l’insertion, le développement local, la création d’activités, la coopération, les associations, l’éduc pop, le militantisme social-politique-écologiste, les luttes, les utopies (comme le revenu de base), les alternatives concrètes (monnaies locales, alimentation et circuits courts, éco-construction), les projets collectifs, la communication interpersonnelle, les émotions, l’écologie intérieure, la violence éducative ordinaire, le corps et les sexualités, les groupes de parole, le genre, les rapports de domination, le rapport à la honte et à la mort, la systémique, l’anthropologie, la philosophie, l’éthique, la spiritualité.

La bougeotte dans la tête et dans la vie. Pionnier. Toujours à kiffer passer de la théorie à la pratique et vice-versa. Souvent le grand écart entre les milieux sociaux. Entre 2. Ou plutôt aux croisements. Du centre et de la marge. Du Nous aux Je. Jamais assez pour être "spécialiste" de quelque chose, mais bien assez pour tisser des liens avec la case d'à côté.
Bon tout ceci explique pourquoi j'ai fini par créer mon propre statut en choisissant la case "chercheur" et en mettant n'importe quoi dedans ! Pour le plaisir.

Aujourd'hui, toujours pratiquant dans le concret et la recherche de congruence idées/mise en pratique,
je me délecte de grilles de lecture systémiques/complexes/globales/holistiques/holoniques/intégrales qui réunissent les disciplines et tissent des liens, là où la modernité, dans son élan analytique, avait créé des séparations : Edgar Morin, la spirale dynamique, Ken Wilber, Philippe Descola, Alessandro Pignocchi, la collapsologie, Bruno Latour, Christiane Singer, Baptiste Morizot...
 

Et justement, le contexte global aidant, un de mes grands questionnements est : et après la modernité ? Comment en hériter, l'inclure (voir ses apports) et la transcender (faire émerger autre chose de plus englobant) ? Comment passer du développement (-international, -local, -personnel) à l'enveloppement ?

Pour faire un parallèle, je crois que le centre de gravité de la conscience collective (les valeurs, la culture, les pratiques) bouge, et qu'une partie est en train de passer un palier, une conscience élargie. Un peu comme quand on est passé de la terre au centre du monde à l'astronomie moderne, un peu comme quand on a arrêté de penser qu'il était normal de tenir en esclavage une partie de l'humanité, nous avons intégré plus de choses dans la sphère de nos préoccupations (donc des connaissances, des droits... nouveaux). Je crois que quelque chose expérimente le passage (après les stades précédents) d'une conscience anthropocentrique/sociocentrique à une conscience mondocentrique, voire kosmocentrique. La sensibilité à la justice sur plus de sujets traduit cela. L'évolution de notre rapport au vivant, aux autres espèces le traduit aussi. Et l'expression d'une spiritualité « hors religion » aussi.

 

Et en même temps, une part de moi voit l'urgence et la catastrophe arriver plus vite que ne se développe la conscience et les actes.
Et spécialement en tant que papa, mais surtout en tant qu'être vivant sensible cela me terrifie certains jours et me donne envie d'aller pleurer des heures sur toutes les places publiques tant mon désarroi et ma peine sont grands, de sentir tant de vies et de beauté s'éteindre. Et tant il me semble qu'il n'y a plus que ça à offrir au monde pour briser la mécanique des infrastructures du ravage (la chosification du monde) : des larmes.

Il y a de la colère aussi. Beaucoup.
D'où la question de l'action, de l'usage protecteur de la force, de la résistance et du sabotage.
Donc la question de la non-violence. La question de l'autre.
Distinguer les visions d'ennemi et d'adversaires. Distinguer l'affrontement et les conflits.
Tenir ensemble la rencontre et le désaccord. 

Tristesse et colère. Vulnérabilité et assertivité. Lâcher prise et intégrité.
Guidé par la joie. La joie de vivre pleinement la sagesse de la peine (qui dit ce à quoi je tenais).
La joie de vivre pleinement la puissance de la colère (qui dit ce que je tiens à protéger).

Encore une histoire de croisements. Et de conscience élargie.

 

« Je ne crois pas en une action qui ne soit pas précédée d'une prière,
et je ne crois pas plus en une prière qui ne soit pas suivie d'une action. »
Marshall Rosenberg

 

Où vais-je avec mon blabla ? Mmmmh bonne question !
Ah oui !

Avec tout ça, et après avoir parlé 10 minutes de la Talvère l'autre jour, j'ai vu à quel point j'avais envie/besoin de partager plus large, en me connectant avec des gens, des réseaux, qui sont peut être un peu aussi à ces croisements théorie/pratique et pensent, cherchent, croisent et essaient.
A la fois pour être stimulé et pour partager mes pépites.
Et aussi pour des passerelles vers des cercles encore plus institutionnels, avec l'énergie de mettre des pieds dans des plats :
en décapant les pensées conventionnelles et/ou en pleurant et/ou en appelant « au feu ! ».

En disant cela, je vois monter mon ennui pour les milieux institutionnels et normés,
leurs codes (rationnels, matérialistes, méritocratiques, patriarcaux et court-termistes)
et leurs plafonds de verre. Et en même temps, je vois que, nourrie par la CNV, ma posture a évolué. Elle me permet de trouver tout le monde très chouchou, même avec mille désaccords et poils hérissés, et ouvre ma curiosité pour entendre les dessous sensibles de ces mondes bien carapacés.

Et donc ! Ma demande.
A partir de ce terreau bien nourri, de théorie et de pratique, j'aimerais m'offrir plus d'occasions de partage, d'éducation populaire du 3ème type (celle avec de l'action, des émotions et même de la spiritualité dedans !), de contamination de milieux sociaux lointains, de percussion des représentations, de croisements avec des fous-chercheurs.

Donc : si tu croises des occasions de ce type, si tu as des idées de personnes, de lieux, de réseaux qui pourraient s'amuser de ces propositions, je suis preneur !
Merci d'avoir lu cette bouteille à la mer. Elle peut être transmise telle quelle.

C'était simple à dire... un peu long pour en écrire les tenants.


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