Il a lu : Onofrio Romano - Towards a Society of Degrowth

Source : https://decroissances.ouvaton.org/2024/02/24/jai-lu-towards-a-society-of-degrowth-donofrio-romano/


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 Voilà donc un livre qui va confronter directement le décroissant mainstream à un changement de donne, un game changer, toute une série de « chanvirements » ou de « perturbatures »2. Ce qui n’est pas gagné d’avance, car ce décroissant est souvent plus à l’aise dans la critique dirigée contre le monde de la croissance que dans la critique interne, cela dû à un penchant pour le relativisme, qui est précisément l’un des effets dialogiques du régime horizontaliste de croissance.

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« En résumé, dans le régime de croissance, un pouvoir a-téléologique public est installé, qui ne se mêle jamais de la question de ce qu’est une vie bonne, parce que la vie sociale doit être considérée comme le résultat involontaire de l’interaction entre les acteurs individuels. Ceux-ci sont souverains dans l’élaboration et la réalisation de leur propre part de vie. La politique a pour seule fonction de préserver, voire de cultiver, la vie « biologique » des citoyens, ainsi que la régulation administrative de leur libre circulation. La  » croissance  » n’est donc rien d’autre que le résultat et la traduction du principe moderne de neutralité institutionnelle » (page 22).

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Dans son plaidoyer critique en faveur de la décroissance, on ne peut pas dire que l’auteur nous prenne en traître car, dès l’avant-propos, il pose que « la croissance est le symptôme, pas la maladie » (page viii). Et cette maladie, il ne la diagnostique pas à partir « des effets directs de la croissance sur l’environnement et la santé » (page ix) mais il la trouve dans le « régime qui génère le fétichisme de la croissance » » (ibid.). Autrement dit, sa porte d’entrée dans la décroissance n’est pas écologique mais socio-institutionnelle : ce qui fait la nouveauté historique de la croissance, ce ne sont pas tant ses effets dévastateurs dirigés contre la nature, c’est l’emprise qu’elle exerce et qui rend nos vies « misérables ». Autrement dit, le péril de la croissance et de son régime n’est pas d’être une menace contre la vie, mais contre le sens de la vie. A se tromper de menace, le risque (politique) serait alors de sauver la vie tout en perdant le sens : « Pour le dire brièvement, nous pouvons sortir de la croissance sans quitter le régime de croissance » (ibid.). Et pour reprendre un jugement célèbre d’Hannah Arendt, je rajoute : on ne peut rien imaginer de pire.



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